Francaisdefrance's Blog

17/09/2015

Michèle Tribalat : « le terrain moral permet d’esquiver le débat »

Filed under: Uncategorized — francaisdefrance @ 20:17

Source : image de l’article http://www.fdesouche.com/647645-michele-tribalat-le-terrain-moral-permet-desquiver-le-debat

Conversion Image-De-Texte en Texte avec http://www.onlineocr.net/

Michèle Tribalat Démographe, chercheuse à l’Ined *

Le Point: En 1979, la France accueillait plus de 120 000 réfugiés venus du Vietnam, du Cambodge, du Laos. Aujourd’hui, nous promettons d’accueillir 30 000 personnes sur deux ans et ce chiffre sème la panique. Nos capacités d’accueil ont-elles changé ?
Michèle Tribalat: En 1975, la France comptait 17 000 Cambodgiens, Laotiens et Vietnamiens. En 2015, la France compte à peu près 5 millions de musulmans et, après les divers attentats, les Français, conscients des problèmes d’assimilation, ne sont pas chauds pour voir débarquer du brasier syro-irakien d’autres musulmans venant s’ajouter à ceux qui sont déjà là. Au départ, c’était 6 000, la Commission en a ajouté 24 000, mais je ne crois pas que ce soit le chiffre de 30 000 qui inquiète. Simplement, les Français se rendent bien compte que cela ne va pas s’arrêter là. D’autant que ces chiffres ne comptent pas ceux qui arrivent spontanément en France. La clé de répartition que cherche à imposer la Commission européenne est appelée à s’appliquer à l’avenir à tout afflux particulièrement massif aux frontières d’un pays. Et l’économie française de 2015 n’est pas celle de 1979. Le taux de chômage n’était alors que de 4,8%.

Vous dénoncez le manque de statistiques, d’outils permettant de penser l’immigration. Sait-on de façon précise quel fut le devenir de ces réfugiés asiatiques ? A-t-on aujourd’hui les moyens de suivre, de façon rationnelle, celui des réfugiés qui arrivent sur notre sol ?
Les données de recensement et des enquêtes nous apprennent que les immigrés cambodgiens, vietnamiens et laotiens ont pris massivement la nationalité française, se sont intégrés sans bruit et que leurs enfants ont très bien réussi à l’école. Ils sont toujours en très petit nombre en France. Mais, c’est vrai, nous ne suivons pas, comme le fait la Suède, par exemple, le parcours des réfugiés. Le bilan de la Suède, pays le plus accueillant en matière d’intégration des réfugiés, n’est pas brillant. D’après Tino Sanandaji, un économiste suédois d’origine kurde qui travaille sur l’immigration, 48% d’entre eux sont sans emploi et, après quinze ans de séjour, leur taux d’emploi n’atteint toujours que 6o%. Les enfants ont des difficultés à l’école. Et ce n’est pas faute d’efforts financiers.

Le débat sur l’ouverture ou la fermeture des frontières en Europe se fait sur le terrain des valeurs. A-t-on raison de faire de cette question un combat moral ?
Le combat est loin d’être clair. Nous nous flattons d’accueillir tous ceux qui auront réussi à mettre un pied en Europe au péril de leur vie et pour le plus grand bénéfice des passeurs. Qu’y a-t-il de moral là-dedans ? Le terrain moral est celui qui permet d’esquiver tout débat démocratique sur la question. On nous dit qu’il faut européaniser la politique migratoire au moment où la crise a été fortement aggravée par les déclarations allemandes qui cherchent justement à entraîner l’UE derrière elle, alors même que les intérêts des pays ne sont pas les mêmes. L’Allemagne, sans migrations, verrait sa population d’âge actif diminuer de 22 millions d’ici à 2060 (projections Eurostat). Mme Merkel a mis ses voisins devant le fait accompli. C’est à eux de jouer les chefs de gare tout au long de la route des Balkans, tandis que les passeurs s’occupent du transport en mer. Si elle ferme ses frontières, c’est aux voisins de gérer les bouchons.

Que pensez-vous de la répartition par quotas ?
Les quotas, s’ils sont votés, sont appelés à se pérenniser. Ils ne portent pour l’heure que sur les pays d’origine pour lesquels le taux de reconnaissance du statut de réfugié est d’au moins 75% (Irak, Erythrée, Syrie). Quelle est la moralité de cette décision ? Que ferons-nous des Afghans qui empruntent aussi la route des Balkans ?
PROPOS RECUEILLIS PAR VIOLAINE DE MONTCLOS

* Institut national d’études démographiques. Dernier ouvrage paru: « Assimilation, la fin du modèle français » (Ed. du Toucan).

« Mme Merkel a mis ses voisins devant le fait accompli. A eux de jouer les chefs de gare. »

Laissez un commentaire »

Aucun commentaire pour l’instant.

RSS feed for comments on this post. TrackBack URI

Laisser un commentaire