Juppé au centre et à côté de la plaque
Une catastrophe n’arrive jamais seule, et c’est en toute logique que le scandale financier autour de Bygmalion explose dans la foulée de la débâcle électorale des européennes. Débâcle qui a placé le Front National en premier parti de France avec 26 %. Et on peut évaluer le refus de la politique de Bruxelles en additionnant droite et gauche contestataires à environ 65 %. Une analyse simpliste consisterait à comprendre que les Français ne supportent plus les dictats de Bruxelles et adhèrent à l’idée de faire baisser l’immigration, pratiquer un certain protectionnisme européen en matière économique, etc. Cette analyse serait trop simple et ce serait sans compter sur l’ultime finesse, l’intelligence supérieure, et l’extrême intégrité morale d’Alain Juppé. Le crâne imposant du triste sire affirme encore une fois sa volonté de se dégager du front… Le sauveur est arrivé et il a tout compris, surtout que c’était son heure, que c’était pour lui maintenant ou jamais.
Ce n’est pas la première fois que l’UMP sort ce politicien à tête d’impôt de ses placards pour jouer le rôle du quai d’Orsay interne. Déjà, lors des tentatives de Fillon de faire pire que Copé pour se faire élire à la tête du parti, ce dernier avait du jouer les diplomates avertis. Aujourd’hui, le maire de Bordeaux fait figure de recours neutre au milieu de la guerre des clans. Neutre ? C’est-à-dire, sans sel ni saveur, sans idées ni convictions, chiraquien pur jus. Parfait pour plaire à une France du ventre mou fatiguée par « tant de haine ». Il met donc sur pied une direction collégiale flanquée de deux anciens de Matignon tout comme lui, Fillon et Raffarin. Le clan Brejnev est ainsi en place à la tête de l’UMP, contre toute attente des militants et du peuple. La Chiraquie tente de reprendre le pouvoir via le boys band et semble proclamer : rien ne changera jamais, la droite continuera à n’écouter ni les électeurs ni les militants et à garantir la rente de quelques élus construits dans les compromissions et les renoncements. Pour Alain Juppé, le salut de la droite, après la déroute des élections européennes, se situe au centre. Il le dit : « L’UMP, l’UDI et le Modem, ça fait 30 [%], et si nous sommes capables de recréer des conditions d’unité entre nos formations politiques, le premier parti de France, ce n’est plus le Front National. » Mais bien sûr, le Centre ! Comment n’y avions-nous pas pensé ? Les Français veulent du Centre, s’ils ont voté à 26 % pour le Front National, c’était pour exprimer un désir de Centre. Si 65 % n’en peuvent plus des politiques de Bruxelles, par le même raisonnement de l’énarque, c’est qu’ils valident la main mise sur l’Europe des partis du centre depuis 1958 ! Celui que Jacques Chirac avait surnommé « le meilleur d’entre nous » est vraiment très doué. Entre nous ? C’est qui ce nous ? Les Chiraquiens ? Sans doute le meilleur des Chiraquiens d’aujourd’hui, c’est certain. Plus puissant que Freud, il vous révèle votre vote inavoué. Vous vouliez voter Bayrou et vous voilà avec un bulletin Marine Le Pen, cela en dit long sur les frustrations de ce peuple qu’il convient de laisser sous tutelle de l’Europe, du centre, et de trois ex-premiers-ministres. Dormez-bien, Raffarin, Fillon et Juppé vous chantent votre berceuse.
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